Photo: Michel Auer
Dans l’œuvre picturale de la fin des années 1960, Heinrich Richard Reimann (HRR), exprime la vibration des couleurs au son de rythmes qu’il orchestre comme des partitions musicales.
Dans ses peintures proches de l’Op Art, la répétition obsessionnelle de stries ondulatoires verticales compose la trame pour l’application de champs polychromes. L’utilisation d’interactions colorées confère l’unité au tableau où la forme se
soumet à la couleur. La créativité de l’artiste stimulée par sa passion de la musique contemporaine, répétitive et du free jazz, le conduit par
la suite à collaborer avec des musiciens.
Dès 1970, il est amené à intervenir fréquemment dans l’espace public ce qui élargit son champ pictural au-delà des limites de la surface peinte. Il introduit alors des aires de silence, des figures géométriques qui redéfinissent visuellement le rythme et l’esprit du lieu.
Dès 1980, HRR réduit son vocabulaire à des formes simples, plus efficaces pour se concentrer sur la couleur, véritable fondement de sa recherche. La couleur est l’élément le plus impalpable, le plus changeant, sur laquelle agit sans cesse l’expérience visuelle de l’artiste. Appliquée de manière patiente et rigoureuse, HRR maîtrise un système implicite de règles lié à la nature même des couleurs.
Dès 1990, HRR conçoit ses premiers tableaux reliefs en bois, construits comme des puzzles où chaque partie de l’ensemble est traitée séparément afin de recevoir les nombreuses couches successives d’une couleur.
Finalement l’assemblage des monochromes donne corps à l’œuvre chromatique puissante, dont les gammes résonnent d’infinies variations.
Son travail s’accompagne de séries d’aquarelles qu’il réalise depuis le milieu des années 1970. Elles sont le reflet d’une quête constante nourrie par les séjours à l’étranger et son intérêt pour d’autres cultures. Pour l’exécution de ses travaux
sur papier, le peintre pose précisément en aplat la couleur fluide par couche successive où la transparence et les recouvrements donnent une gamme subtile, sensible aux couleurs qui viennent moduler le grain du papier.
Ses aquarelles sont parfois des études préparatoires pour d’autres réalisations de grands formats.
L’œuvre picturale d’HRR, intransigeante mais puissante dans sa conception et sa rigueur graphique, laisse rarement de place aux aléas du hasard et aux phantasmes de l’imagination. Peu enclin à se laisser enfermer dans un mouvement, son travail reste en marge, même s’il s’inscrit dans une certaine continuité de l’Art Concret et/ou du Hard-Edge Painting.
Nicole Reimann Krattiger 2008